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Les cultures intermédiaires - la crème solaire du sol

Saison 8 Episode 2 Semis, Floraison, Récolte, Agriculture

Salut c’est Agathe, bienvenue dans Paroles de Terres.

Rappelez-vous, la dernière fois, nous avions voyagé grâce à la cameline de Fabrice. Et bien aujourd’hui on va creuser un peu plus ce sujet des cultures intermédiaires avec Gilles. Gilles est agriculteur dans l’Yonne et il a voyagé jusqu’en Normandie pour nous en dire un peu plus sur ce sujet, c’est parti !

Salut Gilles !

Bonjour Agathe !

On est aujourd’hui en Normandie sur l’exploitation de Fabrice, explique-nous déjà qui tu es et ce que tu fais dans la vie.

Je suis agriculteur en système grandes cultures, viticulture et je suis également apiculteur amateur dans l’Yonne, dans une région différente d’ici et par ailleurs, je suis président de Terres Inovia. Et là tu vas me dire, qu’est-ce que Terres Inovia ?

Terres Inovia est l’institut technique de référence sur toutes les plantes riches en huile et protéines végétales. L’objectif est de trouver les meilleures références adaptées aux contextes pédoclimatiques de toutes les petites régions de France pour permettre aux agriculteurs de produire toutes nos cultures et d’en tirer un gain économique et environnemental fort.

Et c’est ce qui nous amène justement en Normandie aujourd’hui, puisque Fabrice cultive de la cameline. Qu’est-ce qui t’intéresse dans cette culture ?

La cameline est une nouvelle culture en France qui a la particularité d’arriver à maturité en 90/100 jours. Par ses caractéristiques, où elle a une richesse en huile assez importante et une richesse en protéines intéressante également, l’objectif de cette culture est d’arriver à l’emmener à maturité entre deux cultures principales, pour finalement en faire du biocarburant pour l’aviation civile.

Justement c’est ce que Fabrice nous expliquait et je voudrais que l’on détaille un petit peu plus ce sujet-là. C’est quoi une culture intermédiaire ?

Alors une culture intermédiaire, tu pourras aussi entendre le mot de « couvert végétal », de « couvert d’interculture », en fait ce sont des cultures qui vont être semées entre deux cultures principales. Leurs vocations peuvent être totalement différentes : soit elles sont récoltées en graines, comme (par exemple) la cameline ; soit récoltées en fourrage, par exemple les éleveurs qui peuvent choisir de semer une culture pour leurs animaux ; soit elles servent à la méthanisation, si elles sont récoltées en vert, pour faire de l’énergie ; enfin, la dernière possibilité est de broyer la culture, de détruire le couvert et de le restituer au sol.

C’est quelque chose d’obligatoire d’implanter des cultures intermédiaires ?

On est en Normandie, je vais te faire une réponse de Normand : « ptete bin qu’oui ptete bin qu’non »

D’accord…  Mais encore ?

Ça va dépendre des situations. Entre deux cultures principales, une que l’on va récolter au mois de juillet et la culture suivante que l’on va implanter au mois d’octobre, non, ce n’est pas spécialement obligatoire.

D’accord

Par contre, une culture que l’on va récolter au mois de juillet et une culture de printemps qu’on va implanter au mois de février, mars, avril de l’année d’après, là oui le couvert devient obligatoire.

L’objectif est, dans tous les cas, ne pas laisser le sol nu. On sait qu’en l’hiver la pluviométrie est plus importante qu’en été ou qu’en automne. Donc le but est d’éviter l’érosion et le lessivage des nutriments. On sait aujourd’hui que les cultures intermédiaires ou les couverts végétaux ont cette capacité à retenir ces éléments par leurs systèmes racinaires mais aussi de pouvoir capter les nutriments qui sont dans le sol. Et l’objectif derrière tout ça, c’est de préserver la qualité des eaux.

Ça a un intérêt aussi pour la biodiversité ou les insectes ?

Cela a de multiples avantages. Il faut savoir qu’un couvert végétal va fonctionner un peu comme une forêt, une mini forêt. Tu vois là, on a des rayons de soleil, en Normandie ça arrive… et le couvert végétal va créer une ombre sur le sol. Il y a des études qui ont montré qu’en plein été, un couvert végétal permet de réduire d’une dizaine de degrés la température au sol, parce que les UV, les rayons ultraviolets ne vont pas venir taper directement le sol, c’est la plante qui va les capter et qui va s’en servir. Donc cette sécheresse sur le dessus du sol finalement et cette température plus faible permettront aux micro-organismes de surface de pouvoir rester en vie et de pouvoir continuer à effectuer leur travail. Quelque part les couverts végétaux, c’est la crème solaire du sol, c’est l’indice 50 de la crème solaire du sol, voilà.

Super, c’est très clair !

Tu m’as parlé de la biodiversité, effectivement dans le choix des couverts, on va chercher à avoir différentes espèces dont certaines qui vont arriver en fleurs très tôt pour pouvoir avoir un bol alimentaire disponible pour les abeilles domestiques, et moi en tant qu’apiculteur ça me concerne et j’en suis enchanté, mais aussi pour tous les auxiliaires de nos cultures, afin de leur apporter un gite et un couvert, qui sera important à cette époque de l’année où on voit bien dans la nature qu’il n’y a quasiment plus de fleurs.

Alors justement c’est quoi ces espèces que vous allez semer en cultures intermédiaires ?

On va choisir différentes espèces, tout d’abord on va essayer de choisir des légumineuses. Les légumineuses ont la particularité de pouvoir capter l’azote de l’air et la restituer au sol.

Donc pois, féverole…

Pois, féverole, lentilles, fenugrec… L’objectif de ces cultures-là c’est vraiment d’enrichir le sol en azote et cet azote-là ne risque pas d’être lessivé, donc on ne risque pas de le retrouver dans les eaux l’hiver. Ensuite, on va trouver d’autres plantes qui elles vont plutôt aller grignoter, si on peut dire, l’azote qui est déjà présent dans le sol, puisqu’on sait que, lorsqu’on récolte une culture il y a des résidus, des restes d’azote de la culture précédente. Et là, l’objectif est de ne pas perdre cet azote, c’est-à-dire qu’il ne soit pas lessivé et qu’il ne parte pas dans les eaux. Comme on sait qu’il y a des plantes qui ont cette capacité d’aller chercher cet azote-là, on va les associer avec (ces légumineuses).

Lesquelles ?

De la moutarde, de la cameline, des radis… toutes ces espèces de crucifères, voire des graminées comme certains seigles par exemple, qui ont la capacité d’aller chercher de l’azote et au final l’objectif c’est vraiment pour protéger les sols. Et ces plantes-là dont certaines arrivent à cumuler les avantages vont aussi avoir un système racinaire puissant qui va permettre de fissurer le sol et permettre finalement l’écoulement de l’eau pour éviter d’avoir des risques d’inondation, et avoir une meilleure structure du sol.

Merci, est-ce- que tu as un dernier message Gilles ?

Ces cultures intermédiaires finalement, pour moi vont répondre dans les années futures à nos enjeux. On a tous collectivement des enjeux climatiques. En captant du carbone, en ayant des valorisations pour des biocarburants originaires de ces cultures intermédiaires et en évitant tous les produits pétro-sourcés, finalement on va contribuer à réduire le dérèglement climatique. Et juste une chose : se rappeler que la nature a horreur du vide et ça, les cultures intermédiaires y répondent exactement.

Super ! Merci beaucoup Gilles, vraiment

Merci Agathe

A bientôt !

A bientôt.

Merci à tous d’avoir voyagé avec nous. Likez, commentez, partagez si cet épisode vous a plu. Et abonnez-vous pour voir les nouveaux épisodes, salut !

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